Jonathan, des années 30

Année de publication: 1974

 

LASSALLE Jacques  Jonathan, des années 30, collection "Théâtre en France", P. J. Oswald, novembre 1974. -91p.

"Au cabaret des Années 30, Lili la chanteuse (Christine Combe) est habillée en Liza Minelli de Cabaret. Le barman Valentino, frêle voyou blond, ne se sépare pas de son holster, même pour danser le tango. Fats, le pianiste (Gérard Astor), jeune prolétaire effacé et pur, porte une chemise rayée et des bretelles. Horace, le balayeur (Lucien Marchai), ancien combattant en béret, éternel floué, rêve et balaie. Les deux entraîneuses ont eu une vie meilleure ; elles s'appellent Ariette et Nana. Arrivent des personnages troubles : Bonneau-Bonnard, indic ou flic ; monsieur Jules (Jacques Lassalle), qui a de l'autorité, massif dans son manteau vague, avec son chapeau mou ; monsieur X... (Jean Brassat), très élégant, costume sombre, écharpe blanche. Monsieur X... est ministre, il est là incognito.Tout le monde attend, attend Jonathan, qui ne viendra pas parce qu'il est mort. Crime ou suicide ? Jonathan était un escroc de classe internationale. C'était leur maître, leur dieu, leur amant. Une image mythique, la résultante de tous ces personnages types désarmés, mal armés ou perdus dans le marasme qui a suivi la crise de 1929, naviguant plus ou moins bien entre le fascisme nationaliste des Croix de feu et les aspirations de la gauche avant le Front populaire.Jonathan ne viendra pas, et chacun l'évoque, en joue le rôle pour une caméra des années 30. Cabaret dans le cinéma, cinéma dans le théâtre, théâtre dans le théâtre, le spectacle de Jacques Lassalle propose plusieurs degrés de lecture et des références en masse pour " s'interroger sur les conditions idéologiques et économiques qui ont permis les scandales politico-financiers des années 30-34 « . La pièce se déroule comme une complainte faite de couplets et de refrains écrits en vers de mirliton - on pense à Peter Weiss, à Mockinpott, - les personnages sont des stéréotypes évadés des films américains et français d'avant guerre, tels qu'ils sont repris par la mode d'aujourd'hui.Jacques Lassalle ne cherche pas à retracer une situation historique. Il l'analyse à la lumière des scandales actuels. Il ne se veut pas " nostalgique ", il tente d'expliquer la vogue de la nostalgie et pourquoi naît une mythologie. À vrai dire, tout ce faisceau de références semble quelque peu emprisonner les comédiens, déjà retenus par un jeu volontairement froid, " distancié ", synthétique, et par une mise en scène qui les fait surgir des profondeurs de l'ombre - et c'est très beau - pour les disposer en tableaux statiques. À Jonathan des années 30, spectacle riche en propositions et en prolongements, il manque un élément important : l’humour."  Colette Godard, Le Monde, 15 novembre 1973.

Spectacle créé au Théâtre Jean-Vilar de Vitry-sur-Seine, le 8 novembre 1973, mise en scène de Jacques Lassalle, musique de Gérard Astor, costumes de François Peiffer, avec Danielle Babert, Christine Combe, Catherine Dagand, Gérard Astor, Jean Brassat, Daniel Girard, Jacques Lassalle, Lucien Marchal, Bernard Spiegel.